Chez les chiens, davantage encore que leur poil et le talent de leurs toiletteurs, c’est surtout les oreilles qui façonnent le port de tête. Et reflètent aussi l’humeur et la personnalité canine. Portées longues et très basses, elle donnent son air tristounet au basset artésien et une sorte de vague à l’âme au cocker spaniel.
En forme de chauve-souris, elles accentuent le regard lunaire du bouledogue français et du boston-terrier. Pliées comme une rose, les oreilles de la levrette d’Italie parachèvent incontestablement son élégance naturelle et son allure gracile. Quant aux appendices portés bien droits par le berger allemand, elles donnent à ce chien-loup son look fier, viril et sûr de lui. Bref, qui en impose. Presque autant, en fait, que les cheveux en brosse des militaires.
Le port des oreilles dressées et bien droites a d’ailleurs un tel impact dissuasif sur un agresseur potentiel, qu’on ira jusqu’à amputer une partie de la conque auriculaire de certains chiens de garde et de protection tel que le doberman ou le dogue allemand. La principale raison de cette coupe systématique et même rase des oreilles des siècles durant en Occident (et même aujourd’hui encore en Afghanistan) : laisser le moins de prise possible à l’adversaire, aux crocs des loups en particulier. Le fabuliste Jean de La Fontaine avait d’ailleurs fort bien résumé et expliqué le pourquoi du comment de l’essorillage (ou taille) des oreilles: «Chien hargneux a toujours l’oreille déchirée. Le moins qu’on peut laisser de prise aux dents d’autrui, c’est le mieux ! »
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Les oreilles idéales du chien devraient, en fait, ressembler à celle de son lointain ancêtre, c’est-à-dire pointer aussi droites que celles du loup. Malheureusement, la sélection génétique les a tellement tarabiscotées sur certaines races qu’elles sont la cause, désormais, de nombreux problèmes sanitaires et d’otites chroniques en particulier. C’est ainsi que les oreilles lourdes et pendantes du basset-hound, ce symbole sur quatre pattes des célèbres chaussures «Hush Puppies», limitent la circulation de l’air dans le canal auriculaire, élèvent localement la température, favorisent aussi l’humidité et en font de véritables nids d’infections. Ce type d’oreille favorise en outre la formation de gros hématomes qui nécessitent une chirurgie. D’autres races, par contre, ont des conduits auriculaires si étroits que l’air ne saurait y pénétrer. C’est le cas des bouledogues anglais, des shar-peis et des chow-chows abonnés aux otites chroniques. L’abondance du poil dans les oreilles, chez les caniches en particulier, favorise malheureusement ce type d’affection.
Si à l’instar de la chevelure humaine (lisse, ondulante, frisée, rasta…) la forme des oreilles joue un rôle déterminant dans la physionomie, la personnalité et une certaine «esthétique» canines, elle prouve malheureusement, et trop souvent aussi, que «beauté» n’est pas toujours synonyme de santé.