Attaché à un arbre, muselé, affamé. Rogger, un malinois croisé loup tchèque, a survécu une semaine dans la forêt de Vizzavona. Une affaire qui ne cesse d’indigner et pose frontalement la question de la maltraitance animale sur l’île, où les abandons s’enchaînent et la justice peine à suivre. Plongée dans un scandale bien réel.
Une scène de cruauté qui glace le sang
La forêt de Vizzavona, connue pour ses sentiers bucoliques et ses randonneurs, a été le théâtre d’un abandon d’une rare brutalité. Le chien, retrouvé le 11 juin, avait été laissé là une semaine plus tôt, ligoté avec un collier étrangleur et une muselière. Impossible pour lui de boire ou de manger. Il ne devait pas survivre.
Rogger n’a été localisé que grâce à une battue d’envergure, mobilisant une cinquantaine de bénévoles, la gendarmerie de Corte et des éducateurs canins. L’un d’eux, présent sur les lieux, témoigne : « On l’a approché avec prudence. Il était amaigri, méfiant, mais pas agressif. Il voulait juste vivre. »
Le chien n’a dû sa survie qu’à sa force, à sa chance — et à l’obstination de ceux qui ont refusé de le laisser mourir seul.
Que risque la propriétaire identifiée ?
L’auteur de l’abandon a été formellement identifiée. Une plainte a été déposée par la Fondation Assistance aux animaux. L’affaire est désormais entre les mains de la justice. Et les peines encourues sont lourdes.
Conformément à l’article 521-1 du Code pénal, l’abandon d’un animal domestique est passible de trois ans de prison et 45 000 € d’amende. Mais ici, les circonstances aggravantes sont manifestes. Rogger était muselé, étranglé, exposé à une mort lente. La peine maximale grimpe alors à quatre ans d’emprisonnement et 60 000 €.
« C’est un abandon qui ne laisse aucune chance à l’animal », tranche Me Sollacaro, avocate de la Fondation. À cela pourraient s’ajouter des peines complémentaires : interdiction de posséder un animal, voire obligation de suivre un stage de sensibilisation.
La Corse face à ses démons
Ce n’est pas la première fois que la Corse est secouée par un cas de maltraitance animale. Le contexte insulaire, l’insuffisance des structures d’accueil et l’indifférence institutionnelle jouent un rôle aggravant. L’île ne compte que très peu de refuges réellement fonctionnels. Et les associations croulent sous les abandons.
Brigitte Chirigoni, responsable corse de la Fondation Assistance aux animaux, parle d’une centaine d’animaux pris en charge chaque semaine. « On se bat tous les jours contre un mur. Les abandons explosent l’été. Et les sanctions sont quasi inexistantes », déplore-t-elle.
Le sentiment d’impunité nourrit un climat où la cruauté devient banale. Et l’affaire Rogger vient brutalement rappeler cette réalité.
Quand la justice piétine la cause animale
Si la loi prévoit des peines sévères, la réalité judiciaire est tout autre. La majorité des affaires similaires se soldent par des rappels à la loi ou de simples amendes. Clémence Chabert, juriste spécialisée, dénonce une absence flagrante de volonté : « Les magistrats ne prennent pas la maltraitance animale au sérieux. Même dans les cas extrêmes, les peines sont symboliques. »
Pourquoi un tel décalage ? Par manque de formation, mais aussi par hiérarchisation des priorités. Tant que la souffrance animale restera en bas de la pile, les abandons continueront.
Le cas Rogger doit servir de signal d’alarme. L’enquête en cours pourrait marquer un tournant, si elle aboutit à une condamnation exemplaire.
Une mobilisation collective, rare et salvatrice
Ce qui distingue cette affaire, c’est aussi la réaction. Des bénévoles mobilisés jour et nuit. Des réseaux sociaux inondés d’appels à l’aide. Des éducateurs, vétérinaires, randonneurs, citoyens, tous unis pour retrouver Rogger.
C’est une Corse solidaire qui s’est levée, bien loin des clichés. Une île qui protège, qui soigne, qui refuse de fermer les yeux.
La question reste entière : cette mobilisation citoyenne sera-t-elle suivie d’un sursaut institutionnel ? Le procès à venir révélera bien plus que la culpabilité d’une seule personne.

Rogger a été sauvé, mais combien d’autres chiens ne le seront pas ? L’affaire de Vizzavona est un électrochoc. Elle met à nu les défaillances de la chaîne judiciaire, la misère des structures d’accueil et l’urgence d’un changement de culture.
Vous êtes en colère ? Vous avez vécu des situations similaires en Corse ou ailleurs ? Partagez votre expérience, posez vos questions, ouvrez le débat en commentaire. La parole est à vous.
Sources :
- https://www.corsematin.com/article/societe/4766926820690514/quelles-peines-encoure-le-proprietaire-du-chien-abandonne-attache-a-un-arbre-dans-la-foret-de-vizzavona
- https://france3-regions.franceinfo.fr/corse/haute-corse/il-est-plutot-denutri-puisque-cela-fait-une-semaine-qu-il-erre-dans-la-foret-de-vizzavona-le-chien-abandonne-avec-une-museliere-et-un-collier-etrangleur-a-ete-retrouve-3168984.html
- https://france3-regions.franceinfo.fr/corse/haute-corse/on-ne-lui-a-laisse-aucune-chance-un-chien-abandonne-avec-une-museliere-et-un-collier-etrangleur-des-benevoles-recherches-pour-une-battue-a-vizzavona-3168198.html